La Résistance espagnole à Bordeaux et la 1ère rafle des RG (juin 42)


Entre avril et juin 1942, la 3ème section des Renseignements Généraux (RG) agissant sur les indications d'un informateur infiltré dans l'organisation clandestine espagnole de Paris a procédé à de nombreuses filatures.  Les policiers se sont en particulier intéressé à Luis Marrase, responsable de l'imprimerie clandestine de Villejuif. De cette imprimerie, sortaient périodiquement 5 journaux en catalan et en espagnol ainsi que du matériel de propagande en polonais.

Ainsi, le 20 juin, Luis a été suivi alors qu'il expédiait plusieurs paquets de propagande en gares de Montparnasse et d'Austerlitz. Le colis à destination de Bordeaux, déposé en gare d'Austerliz, pesait 7 kilos et était destiné à M. Durand en gare de Bordeaux (expédition 1.225 Expéditeur : Parfums Cyral SARL, 229 rue de Crimée - Parfumerie ou échantillons de parfumerie).

Les services de police des villes destinataires des colis de propagande ont été avisés pour mettre en oeuvre une très discrète surveillance des militants venant récupérer les paquets de façon à les suivre et à les identifier, sans toutefois procéder à leur arrestation.  

A Bordeaux, une surveillance constante, en gare, eut lieu entre le dimanche 21 juin à 19 h et le samedi 27 à 18 h. Personne ne vint réclamer le colis expédié le 20 juin de Paris.

La grande rafle fut déclenché à Paris le 27 juin par les RG.

Ce même jour, l'inspecteur René P., qui était de surveillance en gare de Bordeaux, reçu l'ordre de procéder à la saisie du colis. Il apprit alors qu'un second colis était en souffrance depuis le 28 mai; colis qu'il saisit également.

Le lundi 29, un militant espagnol se présenta en gare pour récupérer le colis du 20 juin mais, étant sur ses gardes et soupçonnant un traquenard, ressortit aussitôt sans que la police n'ait eu le temps de l'arrêter. Un second militant l'attendait à l'extérieur de la gare, prêt à intervenir. Les arrestations survenues à Paris étaient peut être déjà signalées à Bordeaux.


Le Commissaire Poinsot, dans un rapport qu'il adressa le 30 juin à sa hiérarchie, regretta de ne pas avoir été tenu informé des tenants et aboutissants de cette affaire et conclut par ces quelques lignes :

"A Bordeaux où il existe une importante colonie espagnole, laquelle comprend de nombreux éléments douteux, il importe de déceler au plus vite toute action susceptible de mettre en danger la Sûreté de l'Etat et la Sécurité Publique"

L'inspecteur René P. fit l'inventaire des 2 colis :  

- colis du 28 mai :     "Appel à la classe ouvrière"
                              "L'étudiant patriote" du 3 mars 42
                              "l'Humanité" n°160 du 2 mai 42
                              " La Vie Ouvrière" n° 85 du  2 mai  1942
                              " Mundo Obrero " de mai 42
                              "Reconquista de Espana" du 20 mai 42

Il  peut paraître très surprenant de constater que l'acheminement de matériel de propagande français soit assuré, depuis Paris, par  des filières clandestines espagnoles. Est-ce révélateur d'une éventuelle faiblesse de la Résistance FTPF à Bordeaux en 1942 ? Cette propagande française ne pouvait-elle pas être disponible sur place ?

- colis du  20 juin :     "L'Humanité" numéro spécial de mai 1942
                               "Treball" du 22 juin 1942
                               "Reconquista de Espana" du 22 juin 1942


Conclusion : la 1ère rafle des RG contre les Résistants espagnols fut donc un échec total en ce qui concerne l'organisation de Bordeaux.


Documents à consulter (format pdf - cliquez sur l'image) :

   Reconquista de Espana du 22 juin 1942                        Treball du 22 juin 1942 


Reconquista Treball